Les principaux intervenants du secteur de la radiodiffusion ont conçu le MXF, avec une contribution importante des utilisateurs pour s'assurer qu'il répond vraiment à leurs besoins. Il se présente sous la forme d’une norme ouverte – un format de transfert de fichiers public offert à toutes les parties intéressées – qui n'est pas associée à un système de compression particulier et qui simplifie l'intégration des systèmes utilisant les normes MPEG, DV ou des normes de compression non encore spécifiées.

Le transport de ces différents fichiers sera donc indépendant du contenu et n'obli- gera pas à utiliser les équipements de fabricants spécifiques. Tous les traite- ments requis peuvent être effectués sim- plement en appelant automatiquement le codec matériel ou logiciel approprié.

Le MXF est en outre conçu pour une utilisation opĂ©rationnelle : tous les pro- cessus de manipulation sont par consĂ©- quent transparents pour l'utilisateur. Il travaille discrètement Ă  l'arrière-plan. Outre un meilleur interfonctionnement (une capacitĂ© amĂ©liorĂ©e de travailler avec des fichiers audio et vidĂ©o sur des Ă©qui- pements et des applications diffĂ©rents), l'atout majeur du MXF rĂ©side dans le transport des mĂ©tadonnĂ©es.

En le traitant dès le début comme un nouveau format de fichier, ses concepteurs se sont inté- ressés à la mise en œuvre et à l'utilisation des métadonnées. Cet aspect, non seule- ment important pour assurer le bon fonctionnement des fichiers MXF, active également de nouveaux et puissants outils pour la gestion du support et l'amélioration des flux de création de contenu en éliminant la réintroduction de métadonnées répétitives.

L'évolution des technologies de produc- tion et de distribution aux téléspecta- teurs entraîne celle des méthodes d’acheminement du contenu (images et son) au sein des studios. On utilise beaucoup plus les ordinateurs et les sys- tèmes informatiques tels que les ser- veurs, mais on dépend davantage de l'automatisation et de la réutilisation des documents. Il faut transporter les méta- données, mais aussi adapter les trans- ferts de fichiers aux opérations informatisées et les utiliser en continu pour des opérations en temps réel.

Le développement du format MXF est le résultat d'une collaboration remar- quable entre fabricants et grandes orga- nisations telles que Pro-MPEG, UER et AAF. Il permet d’exploiter le contenu sur les diverses applications de la chaîne de production télévisuelle, il assure une exploitation plus efficace et une plus grande liberté de création dans un envi- ronnement unifié en réseau.

Pourquoi ?

L'existence d'un format de fichier ouvert, applicable à l'ensemble du sec- teur et prenant en charge les métadon- nées, aura des répercussions importantes sur la manière dont on manipulera les documents. Les étapes classiques de la création d'un pro- gramme de télévision sont illustrées ci- contre.

Aujourd'hui, pour passer d'une étape à la suivante, il faut transférer des bandes vidéo, des fichiers multimédias propriétai- res, des documents Word, des tableaux Excel, de télécopies, des étiquettes auto- collantes, des pense-bêtes et des instruc- tions orales.

En fait, les seules mĂ©tadonnĂ©es traitĂ©es d'une manière Ă  peu près universelle sont les codes temporels. Les professionnels savent cependant que mĂŞme la manipulation des codes tempo- rels n'est pas 100% clean : on perd sou- vent beaucoup de temps Ă  rĂ©soudre des problèmes de code temporel, ce qui ne serait pas le cas avec une chaĂ®ne de mĂ©ta- donnĂ©es nette et sans dĂ©faut. Plus on comptera de fabricants qui auront adoptĂ© le MXF, plus nombreuses seront les Ă©tapes de la production qui permettront de transfĂ©rer des mĂ©tadon- nĂ©es Ă  la suivante, laissant le profession- nel se concentrer sur le contenu multimĂ©dia et les mĂ©tadonnĂ©es au lieu d'aller pĂŞcher les informations dont il a besoin.

Un exemple simple suffit à le démontrer. Imaginons le tournage d'un film sur la vie sauvage à Masai Mara, au Kenya. Les données GPS (c'est-à-dire les coordonnées géographiques de la caméra) sont ajoutées à chaque plan sous forme d'annotation. Ces métadon- nées resteront avec les prises à l'inté- rieur du fichier MXF pendant la durée du tournage du programme. On peut ensuite, à l'aide d'un processus de pro- duction automatique, convertir ces coordonnées GPS en métadonnées sup- plémentaires lisibles par l'opérateur. Une telle automatisation réduit les tâches ordinaires affectées au personnel et améliore la précision des données stockées.

Le MXF offre un autre avantage : il partage un modèle d'objet commun avec le format Advanced Authoring (AAF). Le format AAF est un modèle de don- nĂ©es sophistiquĂ© et un ensemble d'outils logiciels permettant Ă  des appareils complexes de post-production de parta- ger des donnĂ©es de fond et des mĂ©ta- donnĂ©es. Le transfert des documents dans l'environnement de post-produc- tion et l'extraction du produit fini se font de manière transparente.

Que fait-il ?

Le MXF est un format de fichier poly- valent capable d'exĂ©cuter un certain nombre de tâches :

  • stocker des travaux simples terminĂ©s

avec des mĂ©tadonnĂ©es (en remplacements des bandes) ;

  • stocker des fichiers dans un format

utilisable en continu, permettant de les visionner pendant le transfert ;

  • rĂ©sumer une liste de diffusion de

fichiers et stocker les informations de synchronisation ;

  • envelopper tous les formats de

compression ;

  • stocker les listes de montage des coupes (EDL) et les documents qu'elles

concernent.

Il est important de saisir la différence entre émission en continu et transferts de fichiers. Traditionnellement, la télévi- sion a reposé sur l'émission en continu d'images et de son. Rien de plus logique puisque l’action originale et l'attente du téléspectateur consiste en images et en sons, diffusés en continus et en temps réel.

Les systèmes vidéo composite analogiques PAL et NTSC, les SDI et autres SDTI sont tous basés sur des émissions en continu. Mais les systèmes informati- ques, eux, échangent les données en transférant des fichiers.

Les mĂ©dias en continu :

  • sont visibles pendant le transfert –

avant que toutes les donnĂ©es aient Ă©tĂ© acheminĂ©es ;

  • offrent des retards minimaux pour

l'action en direct ;

  • sont des systèmes de point Ă  point

sans goulets d'engorgement – ils permettent un fonctionnement fiable et continu.

Les mĂ©dias en rĂ©seau :

  • utilisent des composants informatiques standard et bon marchĂ© ;
  • peuvent ĂŞtre stockĂ©s sur de nombreux appareils diffĂ©rents, y compris

des disques et des bandes ;

  • offrent une certaine flexibilitĂ© pour

échanger, partager et distribuer des données.

Ces deux systèmes - émission en con- tinu et en temps réel, transfert de fichiers - présentent tous deux des avan- tages et continueront tous deux à être utilisés. Il est essentiel qu'ils soient dans une certaine mesure compatibles afin de pouvoir cohabiter et échanger des docu- ments entre eux. A cet égard, le MXF de par sa conception est un format de fichier capable de fonctionner en con- tinu (en créant une passerelle entre les deux types de transfert).

Au niveau de l'exploitation, il suffit de demander le transfert. Il est ainsi possible de profiter de la flexibilitĂ© du format AAF en post- production. Puis, grâce Ă  une simple conversion « invisible » de fichier, on peut utiliser le MXF pour l'enregistrement du produit fini dans l'unitĂ© Ă  bande ou la mĂ©moire du serveur. Notons Ă  ce sujet que la conversion de fichiers n'occasionne pas de perte vidĂ©o ou audio si le système de compression ne change pas.

Le personnel d'exploitation et de pro- duction va pouvoir se concentrer sur ses tâches sans avoir Ă  se prĂ©occuper des problèmes de compression. Mais il est Ă©galement vrai qu'aucun format de compression ne sera adaptĂ© Ă  toutes les applications ; on continuera donc Ă  en utiliser plusieurs.

C'est pourquoi le MXF ne dépend pas de la compression. Il offre le même service quelle que soit la type de compression appliqué. Les fabricants peuvent ainsi proposer des équipements dotés de divers codecs de compression, débouchant sur un fonc- tionnement transparent entre des systè- mes tels que le MPEG et le DV.

Formats ouverts et normalisation Le MXF, solution ouverte, a été soumis comme tel à la SMPTE en vue de sa normalisation. A eux deux, le Forum Pro-MPEG et l'AAF ont le soutien d'une grande partie du secteur. De plus, grâce à une collaboration étroite avec des groupes d'utilisateurs tels que l'UER, ils s'assurent que leurs besoins sont pris en compte. Parallèlement, de nombreux fabricants et fournisseurs de logiciels et de matériels désirent mettre en œuvre le MXF aussi vite que possible.

En vue d’une normalisation rapide, le MXF est déjà conforme aux directives KLV de la SMPTE (clé, longueur, valeur – une méthode d’assemblage des données pour les acheminer sur les réseaux) et fait largement usage du dictionnaire et des autres registres de la SMPTE.

Objectif premier du Pro-MPEG et du MXF ; l'interfonctionnement. Il est rĂ©a- lisĂ© Ă  trois niveaux.

  • Plate-forme. Le MXF fonctionnera

sous différents protocoles réseau et sous différents systèmes d'exploitation (Windows, Mac, OS, Unix, Linux, etc.).

  • MĂ©thode de compression. Le MXF ne

fait pas de conversion entre les formats de compression ; il permet de gĂ©rer plus facilement plusieurs formats dans un seul environnement. Il peut traiter la vidĂ©o non compressĂ©e.

  • Emission en continu / passerelle de

transfert. Le MXF est transparent avec les médias en continu, notamment avec le système SDTI dans lequel on obtient un échange totalement transparent. Ce résultat est bidirectionnel (MXF vers continu et vice-versa), ce qui fait que le SDTI s'adapte facilement dans un environnement basé sur des fichiers. C'est une convergence réelle.

Comment ?

A première vue, un simple fichier MXF n'a pas l'air très intéressant. Il se compose d'un en-tête au début, d'un bas de page à la fin et des données du sujet qui constitue le corps du fichier. Chaque élément d'un fichier MXF est codé en KLV c'est-à-dire identifié par une clé unique à 16 octets et par sa longueur.

La définition de la longueur de chaque champ du fichier (y compris du sujet) permet aux décodeurs et aux moteurs de traitement MXF sim- ples d'ignorer les parties du fichier qu'ils ne comprennent pas, autrement dit les clés qu'ils ne reconnaissent pas. On peut alors agrandir le format du fichier et ajouter d'autres fonctions au fur et à mesure que de nouvelles techniques et que de nouveaux systèmes de métadon- nées sont définis.

C'est dans la zone de métadonnées de l'en-tête du fichier MXF que ses avanta- ges sont les plus sensibles. C'est là que les métadonnées sont ajoutées et que les paramètres de temps et de synchronisation sont définis.

La synchronisation et la description du sujet sont contrĂ´lĂ©es par trois ensembles :

  • l'ensemble matĂ©riel (MP) ;
  • l'ensemble fichier (FP) ;
  • l'ensemble source (SP).

MP représente la chronologie du fichier. Le sujet lui-même est décrit dans FP Les données relatives au sujet (listes de montage précédentes, descriptions du contenu, etc.) sont contenues dans SP On peut voir sur l’illustration ci-dessous que chaque ensemble du fichier peut renfermer un certain nombre de pistes. Elles représentent les différents élé- ments du sujet (par exemple une piste images pour la vidéo, une piste son pour chaque canal audio et une piste de métadonnées) et se décomposent à leur tour en SourceClips qui définissent comment créer le résultat souhaité avec ce fichier.

Si un seul SourceClip du MP correspond à un FP entier, le fichier MXF représente alors une seule bande. Si le MP contient plusieurs SourceClips pro- venant de nombreux ensembles de fichiers (enveloppés dans le fichier MXF), le fichier MXF représente une liste de décisions de montage. Pour gérer la complexité du MXF, on a défini des schémas opérationnels qui limitent les fonctions pouvant être uti- lisées dans différentes applications. On a ainsi obtenu une grille divisée verti- calement selon la complexité chrono- logique du fichier et horizontalement selon le nombre d'ensembles contenus dans le fichier .

Le MXF comporte d'autres outils, par exemple des tables d'index, la partition pour la mise en continu, la partition pour la récupération du transfert de fichiers, la prise en charge du système UMID et bien d'autres fonctions qui en font un format de choix pour les appli- cations multimédias.

Métadonnées

L'un des objectifs principaux du MXF est d'assurer un transfert transparent du contenu des programmes et des méta- données associées.

Les mĂ©tadonnĂ©es, ou « donnĂ©es sur les donnĂ©es » comme on les appelle parfois, existent aujourd'hui dans tous les systè- mes. Par exemple, le code temporel en est une forme. Le problème rĂ©side dans le fait que ces informations sont actuel- lement perdues lorsque le contenu est transfĂ©rĂ© d'un système Ă  l'autre Ă  cause des incompatibilitĂ©s. Les systèmes qui auront adoptĂ© le MXF communique- ront en utilisant des mĂ©tadonnĂ©es, de la vidĂ©o et de l'audio.

Les mĂ©tadonnĂ©es MXF peuvent acheminer des informa- tions sur :

  • la structure du fichier ;
  • le contenu du corps du fichier (par exemple MPEG ou DV … 525 ou…625, etc.) ;
  • des mots clĂ©s ou des titres ;
  • des sous-titres ;
  • des numĂ©ros de rĂ©fĂ©rence ;
  • des notes de montage ;
  • le lieu, l'heure, la date et le numĂ©ro de la version ;
  • etc.

Cette liste est sans fin. Dans des cas extrĂŞmes, les fichiers peuvent contenir plus de mĂ©tadonnĂ©es que de contenu vidĂ©o ou audio ! Une mise en Ĺ“uvre efficace des mĂ©tadonnĂ©es est cependant la clĂ© de la gestion des documents. Il est possible de filtrer les mĂ©tadonnĂ©es pour ne conserver que celles qui sont utiles Ă  l'environnement opĂ©rationnel concernĂ©, en coupant ainsi des « mĂ©tamonstres ».

Soutien de l'industrie

La rapidité avec laquelle le MXF a pro- gressé est l’oeuvre de nombreux ingé- nieurs du secteur industriel qui ont collaboré en vue d'un objectif commun. Les fabricants et les utilisateurs doivent admettre qu'il est donc possible d'établir un format de fichier industriel.

L'utilisation de la vidéo, tout comme celle de l'informatique et des serveurs, va s'éten- dre à une gamme étendue d'applica- tions, de diffusion ou non. Plus on tardera à adopter des normes, plus cette tâche deviendra difficile dans la mesure où l'espace laissé vacant sera occupé par des solutions propriétaires.

Pour accélérer les mises en œuvre, plu- sieurs projets SDK (kit de développe- ment de logiciels) ont été lancés. Le code source est accessible gratuitement. A l'aide des outils disponibles, il peut donner très vite des produits dotés de fonctions MXF de base. Pour obtenir davantage de précisions sur ce code, vous pouvez vous adresser au Forum Pro-MPEG, à l'association AAF et à l'UER.

MXF et AAF

Le format AAF est une norme ouverte conçue par l'industrie pour la réalisation et la post-production multimédias. Il permet aux créateurs de contenu d'échanger facilement des fichiers numériques et des métadonnées entre plates-formes et entre applications. Il simplifie la gestion de projet, permet de gagner du temps et de conserver des métadonnées précieuses qui étaient souvent perdues pendant les transferts.

Le MXF, dérivé du modèle de données AAF, est un format d'échange simple, essentiellement destiné à faciliter le trans- fert du contenu fini, de programmes entiers ou de parties terminées entre des serveurs et vers des unités de sauvegarde à bande magnétique. Le MXF facilite aussi les opérations de lecture et l’utilisation de systèmes de production plus simples dans des environnements standard en réseau.

Ces deux formats sont Ă©troitement compatibles.

Si le format AAF s'intègre étroitement aux formats de fichiers médias exis- tants et les complète, le MXF offre la même chose pour les formats en con- tinu actuels et les fichiers AAF. Ces deux formats peuvent être autonomes. Chacun a des fonctions et une concep- tion optimisées dans leurs domaines d'application particuliers. En outre, ils sont indépendants l'un de l'autre. Par exemple, un système de radiodiffusion entier peut n'utiliser que le MXF tandis qu'une maison de post-production se contentera du format AAF. Un radio- diffuseur s'occupant aussi de post-pro- duction peut toutefois parfaitement utiliser les deux.

Le MXF, basĂ© sur les besoins des utilisateurs, possède donc une solide assise commerciale. MĂŞme des fabricants normalement en position de concurrence collaborent en vue de trouver rapidement un système industriel ouvert d'Ă©change de fichiers. Cette col- laboration a permis d'atteindre les objectifs fixĂ©s ; le MXF a Ă©tĂ© soumis Ă  la SMPTE. Il facilitera bientĂ´t le traite- ment des flux dans l'univers conver- gent de la tĂ©lĂ©vision et de l'informatique. Les utilisateurs pour- ront mieux gĂ©rer les mĂ©dias et se con- centrer sur leurs tâches essentielles de production et de crĂ©ativitĂ©.

Auteur :

Bruce Devlin travaille chez Snell & Wilcox depuis 1993 oú il a lancé les travaux sur le codage de compression. Il détient plusieurs brevets dans le domaine de la compression et a rédigé des normes internationales sur l'interfonctionnement MPEG. En outre il dirige plusieurs collaborations visant à créer une norme internationale pour l'interfonctionne- ment des fichiers de diffusion et assure la responsabilité éditoriale de la spécification du format de fichier MXF.

Bruce Devlin est diplômé du Queen's College de Cambridge (Royaume-Uni), promotion 1986. Après ses études il est entré au département recherche de la BBC pour étudier les systèmes de radio-caméra avant de partir en France, où ses travaux sur le codage en sous- bande et sur le format MPEG l'ont amené à concevoir une circuit intégré pour les reporta- ges d'actualités par satellite.

Davantage d'informations sur le MXF, les kits de dĂ©veloppement de logiciels, l'AAF et la SMPTE aux adresses Internet suivantes :